DÉCLARATION LIMINAIRE

COMITÉ SOCIAL D’ADMINISTRATION DES

SERVICES JUDICIAIRES

du 7 mars 2024


Monsieur le Directeur,

La semaine dernière, le Premier Ministre a signé un décret d’annulation de crédits de dix milliards d’euros. La mission justice se voit annuler 327,9 millions d’euros sur 12,2 milliards de crédits votés, ce qui correspond à l’annulation de 129 196 532 € d’autorisation d’engagement et de crédits de paiement dont 4 778 445 € au titre 2 du programme 166 (la masse salariale) de la Direction des services judiciaires.

Le procédé nous paraît curieux, voire discutable. En effet, le 21 décembre dernier, le projet de loi des finances publiques 2024 a été adopté en application de l’article 49.3 de la Constitution et après le rejet d’une motion de censure. Ce passage en force était déjà en soi un déni de démocratie. De plus, aucun collectif budgétaire n’a été présenté au Parlement mais ce sont 10 milliards d’euros d’engagements de dépenses qui viennent d’être rayés d’un seul coup par un simple décret en annulation de crédits publié le jeudi 22 février, toujours sans débats, sans vote et donc sans démocratie.

Ce coup de rabot montre également les limites de la loi de programmation de la justice. Datée du 20 novembre 2023, la programmation budgétaire prévue à l’article 1er du texte est déjà obsolète, contrairement au principe de sincérité budgétaire qui implique l’exhaustivité, la cohérence et l’exactitude des informations financières fournies par l’État.

Cette décision est unilatérale et impacte tous les ministères et champs d’intervention de l’État. Elle vise aussi la masse salariale ! La Chancellerie a beau communiquer que les dépenses de personnels ne seront que marginalement touchées, cela correspond néanmoins à la modique somme de 4,8 millions pour la justice judiciaire. Pour le reste, à notre connaissance, la répartition des économies n’est pas encore arrêtée.

Cette situation pose deux problèmes :

 

Les dépenses de personnel ne « seront que marginalement touchées ». Nous souhaiterions avoir des précisions sur le mot « marginalement » : quelles seront précisément les coupes et de quelle façon interviendront-elles ?

Nos collègues sont très inquiets et se posent une multitude de questions auxquelles il faut répondre.

Et surtout, ces annonces vont-elles impacter la mise en place des réformes actées dans le protocole signé en octobre dernier ? L’UNSa SJ milite depuis des années pour l’accès des greffiers à la catégorie A. L’accès à la catégorie A de 3200 greffiers est donc une très forte avancée sur laquelle il sera impossible de revenir. De même que le plan de requalification des 700 adjoints faisant fonction de greffier, qui attendent tous enfin la reconnaissance de leur engagement professionnel. Enfin, ce coup de rabot budgétaire ne doit pas impacter les négociations qui doivent s’ouvrir sur l’avenir professionnel des Directeurs des services de greffe judiciaires.

 

Sur le fonctionnement des services judiciaires :

Habituellement, les crédits annulés sont soustraits des programmes où la prévision budgétaire était trop généreuse. Or, en 2022, la consommation des crédits en justice judiciaire était de 99,8 %. Cette bonne exécution du budget montre qu’il y a peu de possibilités de coupes. Par ailleurs, si les 3,5 % de crédits mis en réserve en début d’année, qui sont « gelés » pour faire face aux imprévus, devraient être annulés cela limitera fortement les marges de manœuvre et les réponses aux imprévus.

Le choix ayant été fait de préserver les dépenses salariales, les coupes budgétaires porteront en premier sur l’investissement et le fonctionnement. Nous craignons donc que des projets d’investissement soient retardés et les dépenses les plus facilement « pilotables », comme celles relevant du fonctionnement courant, soient en conséquence, menacées.

Ici aussi, nous relevons beaucoup d’inquiétude et une multitude de questions. Le thème central étant : mes conditions de travail vont-elles être impactées et comment ?

Nos collègues, dont l’engagement professionnel n’est plus à démontrer, ne demandent qu’une chose : travailler normalement, dans des conditions normales, ce qui revient à demander des locaux correctement entretenus, du mobilier en bon état, et surtout du matériel et des applicatifs informatiques qui fonctionnent !

Dans ce cadre morose, afin de passer ce cap au mieux, l’UNSa SJ attend donc des assurances sur les engagements de la DSJ et des précisions sur les conséquences des annulations de crédit.

 


Les représentants UNSa Services Judiciaires au CSA SJ


PDF de la déclaration liminaire UNSA SJ au CSA SJ du 7 mars 2024